vendredi 28 mai 2010

Trinité 2010

Sainte Trinité 2010

« Des hommes et des dieux ». Ce film a obtenu le grand prix du jury au dernier festival du cinéma à Cannes. Au-delà du scénario émouvant –qui s’inspire de la présence et du martyre des moines trappistes à Tibhirine en Algérie-, le titre même de ce film dit une vérité toujours d’actualité. Les hommes et les dieux sont en situation de miroir, on dirait aujourd’hui « en corrélation », de sorte qu’on peut exprimer l’adage suivant : « Dis-moi quel est ton Dieu, je te dirai qui tu es ».
Et réciproquement : la façon de voir et de vivre notre humanité dit quelque chose du Dieu auquel nous croyons. C’est que Dieu et l’homme –au sens de l’être humain- sont radicalement solidaires depuis que « Dieu a créé l’homme à son image et ressemblance », selon cette nouvelle stupéfiante que la Bible proclame dès le premier chapitre de la Genèse. Et comme pour préciser le portrait, il est ajouté : « Homme et femme, Dieu les créa, et il leur dit : Croissez, multipliez-vous… »

En fait, il y a deux façons complémentaires de connaître Dieu, d’aborder à l’orée de son mystère qui, de toutes manières, restera toujours au-delà de tout ce que nous pouvons imaginer ou désirer.
La première démarche pour deviner le mystère de Dieu, c’est d’emprunter le chemin du Christ Jésus. « Nul n’a jamais vu Dieu, nous avertit l’apôtre Jean, mais le Fils unique qui est tourné vers le sein du Père, lui l’a fait connaître ».
Et Jésus d’ajouter à Thomas : « Si vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père. ». Et à l’apôtre Jude, Jésus dira encore : « L’Esprit-Saint que le Père enverra en mon nom, lui vous enseignera tout. »
Connaître Dieu, c’est se mettre à l’école de Jésus, c’est retenir ses enseignements, c’est recueillir les leçons intérieures de son Esprit. Et qu’est-ce qu’ils nous disent ?

Parce que Dieu est Amour, rien qu’Amour, tout Amour, il y a en lui un profond mystère de relations, de communications, de communion.

Il y a un Père, pour exprimer en langage humain, un Dieu-Source de vie et d’amour, une générosité originelle et parfaite, une paternité, un engendrement.
Il y a par conséquent un Fils qui reçoit tout du Père, dans l’instant éternel d’un accueil entièrement déplié, avec une divine humilité, mais sans aucune inégalité, parce qu’en donnant tout, le Père partage tout, et rend le Fils parfaitement égal à lui-même.
Et dans la rencontre de cet Amour offert, accueilli et rendu, le Père et le Fils soufflent l’Esprit, comme le fruit de leur éternel baiser qui, au lieu de les tourner en duo l’un vers l’autre, les propulse vers ce troisième qui surgit à l’ouverture béante de leur tendresse infinie.

Comment dire cela sans trembler, sans balbutier, sans vouloir se mettre à genoux pour adorer, sans avoir l’impression de discourir sur Dieu, voire de bavarder au sujet de Dieu ? Mêmes les plus grands saints, et surtout les plus profonds mystiques, ont conscience de cet immense abîme qui fait toute la différence entre des paroles toujours humaines, même si elles peuvent être sublimes, et le mystère dont il est question quand nous osons en parler.

Alors, il y a l’autre chemin. Car Dieu n’est pas seulement l’objet d’une connaissance spéculative, comme s’il fallait être un sur-doué pour en parler, ou alors sortir docteur de notre faculté de théologie. Devant les humbles pêcheurs de Galilée à qui il a confié les secrets de la relation Père-Fils, Jésus s’est exclamé : « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux savants, et de l’avoir révélé aux tout-petits, car tel a été ton bon plaisir ». L’apôtre Jean, le meilleur théologien du groupe des douze, a lui-même écrit : « Quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est Amour. »

Tout est dit. Notre Dieu n’est pas seulement connaissable par l’esprit -et encore toujours partiellement, comme dans un miroir-, il est praticable dans les expériences de l’amour humain qui nous met en communion avec son mystère divin, justement parce qu’il est Amour.

Aimer vraiment, aimer de tout son être, comme Jésus l’a démontré concrètement au milieu de nous, jusqu’à l’eucharistie, jusqu’à la croix : voilà qui nous fait connaître le vrai Dieu. Peut-être aurons-nous de la peine à le décrire, à l’imaginer ou à le dire avec nos mots. Mais, heureusement, le Dieu-Amour ouvre devant tout homme, même celui qui n’a ni les pensées ni les paroles pour l’exprimer, un chemin d’expérience au ras de la vie de chaque jour.

D’abord dans le couple et la famille évidemment, puisque la famille unie par l’amour est par excellence une icône, un décalque, une signature de la Trinité en ce monde. Et puis il y a toutes les autres relations, celles qui font une maisonnée, un quartier, une cité, une société. Et aussi une Eglise évidemment.
Quand c’est l’amour qui domine, quand la charité l’emporte sur les puissances de haine, de racisme, d’injustice, de violence, d’exclusion, de vengeance, c’est la sainte Trinité qui rayonne et se réjouit. Dans nos relations de chaque jour, il y a un enjeu trinitaire. Nous avouons ou nous désavouons le mystère de Dieu, nous annonçons son identité comme amour, ou nous la contredisons.
Car la Trinité est comme remise entre nos mains, --et pas seulement abandonnée à notre esprit- pour que grandisse en nous et entre nous cette expérience qui faisait dire à l’apôtre Jean : « Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons pour que vous soyez en communion avec nous. Quant à notre communion, elle est avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ. Tout ceci, nous vous l’écrivons pour que notre joie soit complète. »

Alors le mystère de la Trinité, tout en demeurant offert aux théologiens et aux mystiques, devient une réalité quotidienne qui nous définit comme êtres faits pour aimer parce que Dieu est Amour. Et parce que, comme vient de le répéter l’apôtre Paul aux Romains, « l’espérance ne trompe pas puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné. » Oui, il y a en nous l’ADN trinitaire !

Connaître Dieu, c’est bien. Vivre trinitairement, c’est encore mieux. Et pour cela, il nous faut aimer sans jamais oublier que Dieu nous aime le premier.

Claude Ducarroz

Semelles de papier

Fleur de vie

Les semelles de papier

En rangeant la maison après la mort de sa mère, Mireille a trouvé deux objets de profonde signification : une paire de semelles. Elles étaient en papier. Oui, on avait découpé, puis cousu plusieurs couches de papier-journal avec un fil solide afin de rendre ces humbles choses praticables.
Confectionner soi-même des semelles avec du papier aggloméré, ça signifie quelque chose, non ? D’abord une grande pauvreté, réelle mais cachée jusque dans les chaussures. Et puis toute une habileté pour compenser la misère par un travail ingénieux qui permette à la personne de marcher correctement, malgré tout.
Dans notre civilisation « kleenex » -on achète vite, on utilise brièvement et on jette-, de tels objets font figure de vieilleries sans intérêt. Et pourtant ils ont tant à nous raconter.
Ils nous disent dans quel état se trouvait notre société aux temps des tragiques privations quand il fallait se débrouiller avec ce qu’on avait, c’est-à-dire presque rien. Ils rendent témoignage à la vaillance de celles et ceux qui ont tenu bon dans l’épreuve pour qu’aujourd’hui nous puissions jouir d’une vie meilleure. Y pensons-nous encore, dans la gratitude et dans l’admiration ? Et savons-nous qu’une grande partie de notre humanité, aujourd’hui même, continue de (sur)vivre dans de telles conditions ? Et souvent pire encore.
Une semelle de papier suffit parfois pour éveiller une intense prise de conscience. Alors, avant de jeter des vieilles choses, peut-être vaut-il la peine de s’arrêter un instant. Et de méditer leur message de silencieuse éloquence. Avec émotion et reconnaissance.
1616 signes Claude Ducarroz

dimanche 23 mai 2010

Une histoire de passion

Fleur de vie

Une histoire de passion

La soirée promettait d’être bon chic bon genre, car il y avait autour de la table des gens de qualité ! En plus du menu, évidemment.
On fait connaissance, à commencer par la profession de ces dames. On n’imagine pas aujourd’hui qu’une femme de la bonne société n’exerce pas une profession passionnante, voire de hautes responsabilités. L’étonnement est venu de Sophie qui avoua, avec quelque hésitation : « Ma profession me convient très bien. Je reste à la maison, toute occupée par mon mari et mes cinq enfants. » Une petite gêne plana sur la tablée.
Il fallait bien commenter ce scoop. L’une des convives se lança la première. Elle souligna d’abord combien il était important pour une femme d’avoir une vie passionnante, autrement dit de brûler d’une passion qui comble ses désirs. Et d’ajouter avec condescendance qu’une abondante maternité pouvait, en effet, rendre la vie d’une femme non seulement bien remplie mais aussi…passionnante.
Et sa passion à elle ? Une petite phrase a suffi pour que chacun la connaisse : « Avec mon mari, nous avons fait un tout autre choix. Nous avons renoncé à avoir des enfants, car nous sommes passionnés par les voyages. A chacun sa passion, n’est-ce pas ? » Et la docte assemblée d’approuver tant de bon sens.
A chacun ses choix en effet, qu’il convient de respecter sans juger les personnes. Mais comparer la passion de la famille (nombreuse) avec la passion des voyages, c’est un peu… surprenant.
Ceci dit, je souhaite beaucoup de bonheur à chacun.
Un bonheur …passionné évidemment !
1555 signes Claude Ducarroz

mardi 18 mai 2010

Le prénom, svp.

Fleur de vie

Le prénom, s.v.p.

Visite à l’hôpital. Après avoir rencontré la personne que je voulais réconforter, je passe vers les autres malades, tous anonymes à mes yeux. Une personne serbe me parle des souffrances endurées à cause de la guerre dans son pays. Une autre partage sa joie de rentrer à la maison le jour même. Quant à la quatrième, elle avait entendu que j’avais évoqué ma prochaine visite chez une dame atteinte gravement par un cancer. Avec un peu d’hésitation, elle me demande le prénom de cette dame afin qu’elle puisse prier pour elle. « J’ai besoin de savoir son prénom, ça m’aidera quand je parlerai d’elle à Dieu », ajoute cette personne à l’accent exotique. Je me permets alors de lui demander son prénom à elle. Il s’agit d’un nom typiquement arabe. C’est pourquoi j’ose lui poser la question de sa nationalité. « Je suis iranienne et musulmane, mais j’aime prier pour les autres, quels qu’ils soient », me dit cette croyante et priante venue de loin.
Il y a de par le monde une mystérieuse communion des priants de toutes les religions. Certes, nous n’envoyons pas nos messages de louange et d’intercession à la même adresse. Mais je crois qu’il n’y a finalement qu’un seul récepteur pour toutes ces prières sincères, surtout quand elles jaillissent du cœur des plus pauvres. « Un pauvre a crié, Dieu l’écoute. Il le sauve de toutes ses angoisses », dit le psaume 34. Tout est dit !
Une musulmane qui prie pour une chrétienne, et réciproquement : c’est peut-être cela le dialogue interreligieux, celui qui aboutit finalement au même Dieu de tout amour parce qu’il est le Père de tous.
1610 signes Claude Ducarroz

La différence n'empêche pas l'amour

Fleur de vie

La différence n’empêche pas l’amour

A Kippel, dans le Lötschental. J’attends le bus devant le home pour personnes âgées. Une résidente (très) âgée sort de la maison avec grande difficulté. Elle est visiblement très fatiguée et même gravement handicapée. Et puis surviennent deux jeunes gens venus l’accompagner pour une petite promenade à son rythme, donc très lentement.
Je suis frappé par la différence d’allure entre ces trois personnages. Ces jeunes sont bien de leur temps, par l’accoutrement excentrique, les cheveux en bataille, etc.. Tout le contraire de leur grand-mère en costume de haut-valaisanne très traditionnelle. Plus frappant encore, c’est l’amour de ces jeunes pour cette vieille femme qui m’a édifié. Un de chaque côté, en lui donnant qui la main qui le bras, ils l’ont escortée pas à pas, doucement, avec une patience admirable, quelques regards complices et une merveilleuse délicatesse dans l’affection.
Chacun avait l’accoutrement de son temps, mais leur amour réciproque était de tous les temps. Il y avait de l’éternel dans ces humbles gestes d’une tendresse sans âge, puisque l’amour ne passe jamais, selon l’apôtre Paul.
Les jeunes nous surprennent souvent. Ils ne se présentent pas toujours selon notre goût, du moins si l’on en reste à la surface des êtres et des choses. Mais ils sont aussi capables de beaucoup d’amour gratuit, notamment à l’égard des personnes âgées. Il suffit peut-être de le leur demander. Et l’on peut voir alors des paraboles de gentillesse qui nous émeuvent et nous réconfortent.
Il ne faut jamais désespérer de la jeunesse !
1590 signes Claude Ducarroz

mercredi 5 mai 2010

Entre Jésus et moi

Fleur de vie

Entre Jésus et moi

Maguy est l’heureuse maman d’un petit Olivier de 6 ans. Parfois elle l’emmène à l’église, non sans craindre qu’il dérange un peu par ses babils un peu trop sonores quelques paroissiens plutôt coincés. Ce dimanche-là, Maguy lâche imprudemment son joyeux luron dans le sanctuaire, et le voilà qui va se planquer tout seul dans le premier banc. Tandis que sa maman l’épie de loin, Olivier reste bien sage durant la célébration. Jusqu’au moment de la communion. Le voilà qui s’avance gaillardement dans la procession pour se poster devant le prêtre en lui tendant la main. Le célébrant a bien hésité un instant, et puis finalement il a donné la communion à ce petit mendiant de l’eucharistie.
La maman se devait de rattraper cet incident à la sortie de l’église, car son cher Olivier n’avait pas encore fait sa première communion. Mais le dialogue a tourné court. Quand Maguy, plus gênée que fâchée, a voulu aborder le problème avec son fils, celui-ci a mis fin à la conversation en répliquant avec une conviction désarmante : « Maman, ça ne te regarde pas. C’est une affaire entre Jésus et moi. »
Si seulement, dans nos cœurs d’adultes, il y avait davantage d’affaires entre Jésus et nous ! Pas seulement lors de la communion eucharistique, mais lorsque nous rencontrons ce même Jésus dans la prière, dans la méditation de la Bible. Et même dans nos contacts avec les gens, pourvu que nous leur montrions de l’amour, puisque Dieu est Amour.
Olivier, redis-moi à l’oreille : c’était quoi, cette affaire entre Jésus et toi ? J’aurais envie de redevenir un enfant…comme toi !
1597 signes Claude Ducarroz

La dame de la Sorbonne

Fleur de vie

La dame de la Sorbonne

Paris. La Sorbonne, la plus ancienne et la plus illustre des universités françaises. J’admire la façade de la chapelle, un chef d’œuvre du 17ème siècle. J’aurais voulu pénétrer à l’intérieur, mais tout est hermétiquement fermé. Je ne verrai pas le tombeau de Richelieu. Sur la place, une statue d’Auguste Comte me laisse de marbre. Ce grand prêtre du scientisme voulait sauver la société par la science après avoir supprimé la religion. Il grelotte sous la neige et devant l’indifférence des passants emmitouflés.
La religion verrouillée pour restauration, la philosophie figée dans la pierre : quel signe de vie en ce lieu symbolique des grandeurs et des misères de la culture la plus prétentieuse ?
Là, au bout de la place, au ras du trottoir, une semi clocharde est assise sur une chaise branlante. Elle distribue des grains de riz à un bataillon de pigeons qui lui font la cour en un cercle piaillant et réjoui. La dame leur parle, les appelle, les gronde, essaie de faire régner une certaine discipline. En somme, en ces lieux déserts malgré le prestige des monuments, voici de la charité et de la vie, la sagesse suprême sous les haillons d’une pauvre hère au cœur tendre.
Il y avait de la beauté dans ses gestes de bonté. Elle nourrissait des oiseaux, mais qui lui donnait, à elle, sa part d’attention et d’affection qui seules permettent de vivre humainement ?
Sur cette place dédiée à la raison et à la foi, une humble parabole de la générosité terre à terre m’a réchauffé le cœur.
Il y a encore de l’amour en ce monde.
1560 signes Claude Ducarroz

Après la crise

Eglise en crise. Et après ?

Pour dynamiser la vie de l’Eglise catholique, le pape Benoît XVI a lancé une année sacerdotale censée « promouvoir un engagement de renouveau intérieur de tous les prêtres afin de rendre plus incisif et plus vigoureux leur témoignage évangélique dans le monde ». Las ! Au-delà de quelques manifestations fort édifiantes, on constate que, médiatiquement parlant, on discute surtout des prêtres pédophiles ou peu scrupuleux avec leur engagement au célibat.
Devant la crise –ou le désastre-, à qui la faute ? Au diable, évidemment. Aux médias malveillants à l’égard de notre Eglise, ce qui revient à peu près à la même chose, selon certains. A notre environnement pornographique qui cloue au pilori les pauvres (prêtres) pécheurs après les avoir incité à commettre allégrement toutes les turpitudes.
Toutes ces réactions bottent en touche, sur le refrain connu et inutile : « C’est la faute des autres ! » Il vaut mieux, je crois, reconnaître humblement que nous avons péché et chercher comment, dans la prière et le courage, sortir de cette crise par des opérations de recentrage sur l’essentiel.
La transparence d’abord. C’est tout ce qui se met en place pour les douloureuses « opérations-vérité », pour le secours aux victimes, pour une meilleure sélection des candidats au ministère de prêtre, etc… Mais c’est aussi reconnaître que la grande majorité des prêtres –forcément imparfaits- donnent leur vie généreusement pour l’Evangile et pour l’Eglise, au service de communautés qui se cramponnent à la foi pour demeurer vaillantes dans un contexte d’épreuves pénibles. « Ne crains pas, petit troupeau… ».
Il reste le pas suivant, le plus difficile à accomplir, celui d’une vigoureuse conversion. Car il s’agit de procéder à des réformes en profondeur qui visent le long terme et exigent des changements à la fois dans le choix des priorités et dans le rôle des structures.
Spirituellement, il est urgent de « revenir au centre », ou plutôt à l’essentiel. L’Eglise –c’est nous tous- doit se recentrer sur le Christ pascal et son Evangile vécu, quitte à simplifier beaucoup de choses dans les périphéries de ses traditions. Il lui faut retrouver son cœur mystique et prophétique, qui doit battre à l’unisson de celui du Christ, l’intime du Père et l’ami de tous les hommes, à commencer par les plus pauvres et les plus souffrants. Faire Eglise, c’est se mobiliser dans l’amour pour annoncer cet Evangile-là dans notre société telle qu’elle est, ce qui suppose la collaboration fraternelle de tous les ministères, tous utiles parce que complémentaires. Dans cette conjoncture, élargir les voies d’accès au presbytérat et redéfinir les formes de vie des prêtres : tout cela devient incontournable. Nous ne pouvons plus nous contenter de gémir dans le désert.
De sérieuses remises en questions deviennent aussi urgentes au plan des structures ecclésiales. Le fonctionnement de l’autorité dans notre Eglise aboutit trop souvent à des pannes, et bien au-delà des simples maladresses d’information. Selon les bons exemples pris dans la Bible quand il y a crise dans les communautés (Cf. Actes 15), on s’en sort lorsque la vie circule bien entre trois pôles de réflexion pour mener à de justes décisions, y compris avec le Saint-Esprit ! Il y a certes le pôle personnel représenté par le « ministère de Pierre ». Il y a aussi le pôle collégial exercé par l’ensemble des évêques bien reliés à leur peuple. Il y a enfin le pôle communautaire dans les expressions multiples du témoignage vécu par les « simples fidèles ». Cette circulation vitale du triple sang ecclésial ne fonctionne pas bien dans notre Eglise. Dès lors il ne faut pas s’étonner qu’il y ait des infarctus dans l’institution fatiguée, surtout par temps de tempête sur la mer de notre société.
Une solution ? La plus traditionnelle, c’est de provoquer un évènement de nouvelle Pentecôte. On appelle cela un concile.
Jean XXIII, reviens !
3916 signes Claude Ducarroz