mardi 26 février 2013

Reliques. Suite et fin.

Les reliques ! Ca existe encore ?




Je vous l’avoue : les reliques n’étaient pas ma tasse de thé chrétienne. D’ailleurs, je continue d’estimer qu’elles interviennent de manière très marginale dans ma vie spirituelle. Mais des évènements bien involontaires m’ont propulsé dans un tourbillon médiatique qui continue de m’étonner. Et c’est justement à propos des reliques. Même si je préfèrerais parler d’autres sujets plus importants, j’ai dû me remettre à étudier cette chose-là.

J’ai compris qu’il était beau de voir les premiers chrétiens entourer de vénération les restes de leurs martyrs, ces grands frères et sœurs, les héros de leur foi. J’ai mieux saisi pourquoi, dans les autels où on célèbre l’eucharistie, on a souhaité placer des reliques qui manifestent symboliquement une double alliance : avec le sacrifice du Christ et avec la communion des saints. J’ai appris combien, au cours de l’histoire, le culte des reliques avait parfois dérapé dans la religiosité douteuse, la superstition et même le commerce, toutes choses dont les réformes protestantes nous ont aidés à nous libérer peu à peu.

Mais je ne peux nier que je suis aussi touché par la piété sincère de nos frères et sœurs d’Orient qui vénèrent ces objets sacrés avec d’émouvantes démonstrations de foi.



Et je regarde dans mon bureau. Il y a une petite table surmontée de photos. Pêle-mêle, j’ai placé là des objets sans valeur marchande, des images –souvenirs auxquelles je tiens beaucoup parce qu’ils me sont très chers. Pourquoi tout cela ? Quelque part, ce sont des mémoriaux. Ils me rappellent ces personnes, souvent disparues, qui m’ont tant aimé et que j’ai beaucoup aimées. Les revoir ainsi, par symboles interposés, réveille plus que des souvenirs. C’est une façon humble de ranimer la flamme de la communion avec elles, surtout si j’estime qu’elles sont encore vivantes en Dieu.

Une bougie allumée lors d’un anniversaire, un objet personnel qui me parle au cœur : nous ne devons pas avoir honte de ces simples gestes, de ces petites choses. A condition de les situer juste évidemment, à savoir dans l’ordre des symboles qui contribuent à nourrir silencieusement la vie du cœur et de l’esprit. Pour ne pas oublier, et aussi parfois pour trouver une source d’inspiration.



Et si les reliques, dans la grande famille chrétienne, jouaient un peu ce rôle ?

Bien modestement évidemment.



Claude Ducarroz

jeudi 21 février 2013

Le pape que je préfère

Le pape que je préfère




Non. Quitte à vous décevoir, je ne vais pas m’adonner au jeu des pronostics papaux. Ni nom ni photo. Mais je peux quand même un peu rêver à haute voix devant vous.

Je souhaite un pape libre, qui étonne, qui ose des gestes, qui fasse signe.

Les papes parlent beaucoup (trop ?). Les papes écrivent beaucoup (trop ?). Mais qui les écoute, qui les lit ? Leurs collègues évêques sans doute. Les théologiens, j’espère. Les gens les plus engagés dans l’Eglise : probablement. Et encore !

Mais le grand public, que retient-il du passage d’un pape parmi nous ? Surtout ses gestes forts, quand ils vont au-delà des effets d’annonce, quand ils sont chargés d’un message important qui raconte l’évangile en acte.



Jean XXIII. Il fallait rénover l’Eglise catholique : il a convoqué un concile. Paul VI. Il voulait relancer l’œcuménisme : il va en Terre sainte, il y embrasse le patriarche orthodoxe Athénagoras ; il vient à Genève auprès du Conseil œcuménique des Eglises. Il s’en va aussi à New York dans l’enceinte de l’ONU pour dire avec des larmes dans la voix : « Jamais, plus jamais la guerre ! » Et Jean-Paul II. On retiendra l’audacieuse rencontre d’Assise en 1986 pour placer le dialogue interreligieux au service de la paix. J’ai pleuré quand il est allé embrasser en prison celui qui avait voulu l’assassiner. Une magnifique parabole du pardon, toute en silence, qui en dit plus long que tous les discours sur le sujet. On pourrait multiplier les exemples.



N’est-ce pas dans la droite ligne de l’Evangile ? Jésus n’a rien écrit. Mais quand il voulut se proposer comme le pain de la vie, il a d’abord multiplié les pains pour la foule ; quand il a cherché à faire comprendre qu’il était la lumière du monde, il a commencé par guérir un aveugle-né ; quand il s’est présenté comme la résurrection et la vie, il a fait sortir Lazare de son tombeau. Et surtout quand il a voulu démontrer jusqu’où allait son amour pour nous, il est monté librement sur la croix. Sans compter le cadeau silencieux de la résurrection.



Je ne sais pas qui sera le prochain pape. Mais, quel qu’il soit, il me sera permis de le souhaiter autant prophète que prêtre, autant acteur que parleur.

A l’image de Jésus en somme !





Claude Ducarroz

Voir www.cath.ch

mardi 19 février 2013

Entre boeuf et cheval

Entre bœuf et cheval




Quelle horreur ! On a mis du cheval à la place du bœuf. Et sans nous demander ce qu’on en pensait. Notre assiette en est toute retournée. Et toute l’Europe aussi. La Suisse avec, pour une fois. On est enfin uni… dans l’indignation gastronomique.

Je le reconnais : ce n’est pas bien de tromper ainsi ses clients. Les échanges humains, même ceux qui passent par l’estomac, exigent une stricte loyauté, gage de la confiance. Il faut taper sur les doigts de ces menteurs et leur faire promettre de ne jamais recommencer. Vlan !

Mais sachons raison garder. Il n’y a ni feu au lac ni danger pour la santé. Car le cheval, n’était-ce sa charge symbolique, est aussi bon que le bœuf pour nourrir les humains. Surtout quand ils ont très faim. En plus, c’est meilleur marché, mais il ne faut pas trop le dire : ça pourrait les encourager à récidiver, les valseurs d’étiquettes, pour se faire du fric en catimini.



Devant l’ampleur du scandale -vous pensez, nous tromper sur la marchandise, même sans aucun dommage réel !-, je me permets de penser à autre chose. Ou plutôt à d’autres personnes.

Il y a dans notre monde, pendant que nous auscultons au microscope nos raviolis, spaghettis et autres mets à la viande hachée, oui, il y a des millions de pauvres humains –et parmi eux des enfants- qui regardent avec désespoir leur assiette vide. D’ailleurs la plupart n’ont pas d’assiette du tout. Et surtout rien à manger, ou si peu. Comme ils souhaiteraient avoir dans leurs mains tendues et dans leur estomac qui crie famine un peu de bœuf ou de cheval, c’est égal. Mais au moins quelque chose pour survivre. Ils ne sont pas gourmands : ils voudraient seulement vivre.



On me dira : le grand malheur des uns ne justifie pas le petit malheur des autres. C’est vrai. Mais peut-on encore appeler injuste malheur, énorme scandale une affaire de bouffe mal étiquetée, même pas avariée, quand le vrai malheur et l’inadmissible scandale sont ailleurs : que des humains comme nous aient faim, au point d’en être malades, jusqu’à en mourir ?

Seulement voilà : c’est ailleurs, là-bas, très loin, même si, presque tous les soirs, ils viennent nous rendre visite dans notre salon par la télévision ou l’internet, juste avant que nous passions à table.

Pour manger du bœuf qui est peut-être du cheval. Quelle horreur !

A propos : c’est quoi l’horreur ? C’est où ?



Claude Ducarroz



Voir www.cath.ch

samedi 16 février 2013

Homélie pour le 1er dimanche de Carême

Homélie


1er dimanche de Carême



C’était au cours d’une visite de la cathédrale. Au bas du vitrail de l’épiphanie –qui illustre la scène biblique de la visite des mages-, l’artiste Josef Mehofer a représenté le massacre des innocents par le roi Hérode le Grand. Le cruel despote est conseillé d’une part par la mort –un squelette plutôt repoussant- et d’autre part par le diable qui donne le bras à un magnifique serpent, le symbole habituel du mal et du Malin. Et comme je faisais remarquer à une pieuse religieuse que ce serpent me semblait particulièrement beau, et même attirant, elle me répondit : « C’est vrai ! Mais justement, c’est là le problème ! » Elle avait tout compris de ce qu’est la tentation.



D’après l’Evangile de ce jour, Jésus fut conduit au désert par l’Esprit-Saint. Très bien ! Or c’était pour qu’il soit mis à l’épreuve par le démon. Cette étrange collaboration pose question. La tentation, certes, n’est pas encore le mal. Mais elle peut y conduire. La beauté du serpent est parfois séductrice.



Comment traduire la demande du Notre Père : Ne nous laisse pas succomber à la tentation ? Ne nous soumets pas à la tentation ? Ne nous induis pas en tentation ? Ne nous conduis pas jusqu’à la tentation ? Les exégètes s’arrachent encore les cheveux pour proposer une traduction correcte. Si l’on retient la leçon des tentations du Christ, la tentation serait plutôt une épreuve à laquelle tout homme est soumis, au risque qu’il se coupe de Dieu et se laisse séduire par le désir de vivre sans Dieu ou avec un dieu selon ses propres vues.







On peut aussi dire : une mise à l’épreuve pour faire la preuve.

Jésus lui-même, dans sa pleine humanité, a voulu passer par là. Ne soyons donc pas étonnés d’y être confrontés, nous aussi. Pas de panique, s’il-vous-plaît !



Le démon s’adapte toujours habilement à celui qu’il veut tenter. On le voit très clairement dans le cas de Jésus de Nazareth, le Messie et le Sauveur, au moment où il va commencer son ministère de prédicateur de l’Evangile.



Il jeûne, il a faim : le pain facile. Il sera reconnu comme le Seigneur : tous les royaumes de la terre d’un seul coup à ses pieds. Le fils de Dieu, tout rempli de la puissance divine : l’exploit d’un merveilleux miracle personnel. Tout cela à coups de citations bibliques et à condition de faire allégeance au fameux serpent, le si beau problème.

Et Jésus résiste. Pas en fuyant, mais en affrontant le diable. Il a en lui la force de l’Esprit. Il recourt à la Parole de Dieu. On peut imaginer qu’il priait intensément le Père.



Ce même Esprit, il nous l’a donné et souvent redonné à partir du baptême. Cette même Parole de Dieu, elle est à notre disposition, personnellement et en Eglise. Cette même prière, à la manière d’un enfant en danger qui s’adresse à son père, nous pouvons sans cesse l’exprimer à Dieu.



Nous sommes entrés en Carême. C’est un temps de tentation, d’épreuve, mais en vue de la conversion et finalement de la victoire pascale.



Concrètement, comment traverser nos épreuves en forme de tentation ? Si l’on regarde à nouveau l’évangile de ce jour, les rendez-vous sont les mêmes. En fait, il y a deux fausses manières d’envisager ce combat.

* On peut évidemment succomber immédiatement à la tentation, se coucher aussitôt devant celui qui nous tend des pièges. Il a gagné et l’affaire est réglée, pour notre malheur.

* On peut aussi voir du mal partout et finir par ne plus vivre en humain sur une terre maudite et se retirer du monde, comme si l’on pouvait se retirer de soi-même par un souci radical d’une pureté inaccessible. La solution est ailleurs : user sans abuser, tout faire passer dans l’ardent creuset de l’amour authentique.



* Par exemple l’avoir. On peut en faire une obsession -toujours plus, à tout prix- au point que l’argent ou ce qu’il permet d’acquérir devient un dieu qu’on adore, et qui finit par nous enchaîner. On peut aussi faire de ses biens, grands ou petits, une occasion de partage, de solidarité, de relations : en un mot, d’amour partagé, sans tomber dans la misère.

* Et le pouvoir. On peut en faire une occasion de domination jusqu’à l’esclavage, dans la violence ou, plus subtilement, dans le conditionnement qui manipule l’autre. On peut aussi en faire un service du bien commun, quand le pouvoir devient une autorité, autrement dit le rayonnement d’une personnalité qui s’investit pour aider l’autre à grandir. Et il faut de telles autorités pour que fonctionne une société vraiment humaine.

* Le savoir aussi. C’est magnifique, le savoir, que ce soit la science ou la sagesse. Mais on peut aussi, à coup d’orgueil, estimer alors qu’on peut se passer de Dieu, croire qu’on se suffit à soi-même, ce qui conduit souvent au mépris des moins savants ou des plus faibles, comme s’ils étaient des sous-hommes, alors que nous sommes tous créés à l’image et à la ressemblance de Dieu.

* Enfin le jouir. Les bonnes choses de la vie, à travers l’exercice de nos sens, sont aussi des cadeaux de Dieu, qu’on aurait tort de mépriser. Mais nous savons par expérience que, si l’on en use sans modération, à la manière de gloutons égoïstes, elles provoquent des dégâts souvent irréparables, que ce soit dans nos relations, dans la nature et aussi en nous-mêmes. Il suffit de penser à l’écologie ou à notre santé.



Le Carême est un bon temps pour se poser ces questions. Pas dans un esprit chagrin comme s’il fallait être un saint triste pour être un saint. Je me souviens de la remarque d’un ami qui me disait de quelqu’un : « On le croyait saint. Il n’était que maigre. » Non ! Vivons ce Carême dans un esprit de libération qui nous permette de mieux respirer notre humanité sans les grippes, rhumes et bronchites du péché qui abîment notre santé spirituelle.

Finalement, c’est toujours une question d’amour.

Un avoir pour partager avec les autres. Un pouvoir pour servir les autres. Un savoir pour élever les autres. Un jouir pour épanouir, soi et les autres.



Que le Christ des tentations, celui qui les a éprouvées vraiment pour les surmonter vaillamment, nous aide sur cette route de croissance qui rayonne déjà des lueurs de Pâques.



Claude Ducarroz



vendredi 1 février 2013

Aux religieuses et religieux

Homélie


Présentation du Seigneur 2013



Je vous regarde… Pardon : je nous regarde ! Est-ce rassurant ?… est-ce inquiétant ? Nous sommes en bonne place dans l’évangile de cette fête : Syméon, un vieillard -certes juste et religieux comme vous, mais qui évoque sa mort prochaine-, et Anne, certes prophète, mais qui a atteint le bel âge de 84 ans. Sans procéder à une enquête scientifique, je crois pouvoir dire que notre moyenne d’âge nous rapproche de ces deux personnages vénérables, plutôt que du jeune couple qui vient conduire son bébé au temple de Jérusalem.



On pourrait faire dans la nostalgie, voire la déprime, n’était-ce justement cet enfant nouveau-né appelé Jésus de Nazareth, que ses parents viennent porter là en vue de sa consécration –qu’on peut bien appeler religieuse- « selon ce qui écrit dans la Loi. »



Car ce bambin muet, c’est bel et bien lui qui est au centre de l’évènement, et tous les autres protagonistes se situent par rapport à lui. Et c’est encore lui, sans le savoir sans doute, qui va bouleverser la vie de chacun. Se laisser bouleverser par sa présence, pourtant fort discrète : voilà qui est d’une part un signe de jeunesse, et d’autre part le cœur de leur consécration à Dieu, puisque tout se passe dans le temple du Seigneur au cours d’une liturgie.



Apparemment, pour Marie et Joseph, rien que de très normal. Ils sont de bons juifs pieux, ils viennent offrir leur garçon premier-né au Seigneur, selon les prescriptions de la loi, avec le modeste sacrifice de deux colombes, le minimum requis de la part des pauvres.



Mais regardons de plus près l’attitude de Syméon qui est décrit comme un « religieux », sans doute aux cheveux blancs, s’il en a encore. Que fait-il ? que dit-il ?



* D’abord, il est un croyant de la longue espérance, à l’instar d’Abraham, attendant depuis toujours la consolation d’Israël. Persévérer dans l’espérance, et peut-être même espérer contre toute espérance, n’est-ce pas le défi que nous avons tous à relever dans les circonstances où nous sommes, que ce soit dans l’Eglise ou dans la société ?

* Et puis ce brave Syméon vient au temple, là où le hasard –à moins que ce soit la Providence ou simplement le devoir- fait que l’on y croise Jésus, avec Marie et Joseph, oui, là où ce même Jésus nous donne rendez-vous, que ce soit dans la liturgie ou dans le silence. Nos chapelles ou églises valent bien ce temple caduc pour continuer de rencontrer le Seigneur et le Sauveur désormais vivant pour toujours, dans sa Parole et dans son Pain.

* Ne craignons pas de le prendre dans nos bras, ce Jésus aux bras grand ouverts, en attendant qu’il se laisse ouvrir même son cœur sur la croix, pour nous et pour la multitude. C’est peut-être cela, tout simplement, l’adoration, la prière, ces apostolats mystiques qui nous resteront toujours, jusqu’au dernier jour, quand tous les autres nous sembleront impossibles désormais.

* Et les conséquences sont évidentes, comme on le remarque chez le vieillard Syméon, parce que la communion d’amour avec Jésus, quelle que soit sa forme, produit toujours les mêmes fruits, à tout âge et en toutes circonstances : la louange –« il bénit Dieu »-, la paix intérieure –« laisse ton serviteur s’en aller dans la paix »-, la fécondité missionnaire – pour que le salut et la lumière de l’Evangile gagnent tous les peuples.

A nous de jouer comme Syméon, personnellement et en communauté.



Voilà ! C’était pour les hommes qu’on appelle « justes et religieux », et il y en a heureusement parmi nous. A relire l’évangile de près, on constate que la brave Anne de 84 ans est un peu le pendant féminin de Syméon : même cheveux blancs sans doute, même amour du temple dont elle ne s’éloignait pas, même esprit de prière et de louange. Et surtout la même communion avec cet enfant, qui suscita sans doute en elle des sentiments maternels, en elle qui était devenue veuve après 7 ans de mariage.

Et pourtant quelque chose de particulier est signalé à son sujet : elle était prophète. Une femme prophète, une religieuse prophète : on ne s’y attend pas nécessairement dans les environs de nos temples et sacerdoces. Et pourtant voilà une belle fonction que les femmes en Eglise accomplissent encore, sans qu’elles soient assez écoutées sans doute. Dans nos familles et communautés chrétiennes, n’est-ce pas elles qui, le plus souvent, à l’instar de la prophétesse Anne, parlent de l’Enfant Jésus autour d’elles, non sans partager avec Marie quelque cœur transpercé, quelques glaives intérieurs ?



Et puis, que ce soit sous la modalité du féminin ou du masculin, la vie religieuse, plus que jamais, n’est-elle pas surtout du domaine du prophétisme, cette mission souvent incomprise, parfois même décriée, qui continue pourtant de dire l’Evangile au cœur de notre monde ?

Vous n’êtes plus en bataillons compacts dans les allées des pouvoirs bien établis, vous n’êtes plus en escouades dominantes sur les chantiers les plus bruyants. Vous êtes là où les circonstances et Dieu lui-même vous envoient : congrégations abrahamiques, humble levain dans la pâte humaine des douleurs et des malheurs, modestes serviteurs et servantes dans les communautés d’Eglise, sans doute pas assez reconnus et remerciés.

Mais vous êtes toujours là, à votre place de fidélité, de persévérance et d’espérance, dans l’accomplissement de vos vœux qui brillent plus que jamais comme des étoiles précieuses, parce que discrètes et même fragiles, dans les nuits de notre monde.

Finalement, comme Marie au temps de la présentation au temple, elle la « petite servante du Seigneur », la femme de Nazareth, la pèlerine de la visitation, l’audacieuse prophète du Magnificat.

Et finalement aussi comme Jésus, qui retourne à Nazareth après la liturgie du temple, car il fallait que l’enfant –lui le sauveur du monde- « grandisse et se fortifie, tout rempli de sagesse, car la grâce de Dieu était sur lui. »

C’est tout cela que nous pouvons nous souhaiter les uns aux autres, et surtout demander au Seigneur dans la prière les uns pour les autres au cours de cette messe, là au cœur de nos Nazareth religieux où ne manque jamais la présence rayonnante de Jésus à celles et ceux qui l’ont choisi parce qu’ils se savent aimés par lui jusqu’au bout.

Y compris jusqu’au bout de leur vie. De nos vies.



Claude Ducarroz