Pâques 2018
Voilà ! C’est fait. Et bien fait. Le
Christ est ressuscité. Jésus de Nazareth est entré dans la gloire de Dieu. Tant
mieux pour lui.
Et après ? Et
nous alors ?
Il nous faut d’abord mesurer, un peu au moins,
la merveille qui vient d’arriver. Et nous laisser émerveiller.
Alors que tous les hommes sont mortels et
retournent, d’une manière ou d’une autre, à la poussière d’où ils sont tirés,
voici que l’un d’entre eux, de chair et de sang comme tous les autres, sort de
son tombeau et revient à la vie.
Mais attention ! Pas pour jouer seulement
quelques prolongations en attendant de re-mourir pour de bon. Il s’agit d’une
résurrection et non pas d’une réanimation. A partir de cette relevée d’entre
les morts, le Christ ne meurt plus, plus jamais.
Il est
entré dans un autre univers, le monde de Dieu, ce qu’on appelle son royaume,
comme il est dit : « … là où il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni
souffrance, car la mort ne sera plus. ».
Il y est maintenant, avec son corps
transfiguré. Car c’est toute son humanité qui participe désormais à la gloire
de Dieu.
Devant cette merveille, qui demeure un profond
mystère, on peut réagir de plusieurs façons. Beaucoup n’y croient pas, parce
qu’ils estiment que c’est impossible, comme ils disent : « trop beau
pour être vrai. » Et ils continuent
leur chemin vers la mort, sans l’espérance d’un au-delà.
D’autres y croient …un peu. En faisant
confiance aux témoignages exprimés dans la Bible, ils croient que c’est bel et
bien arrivé à ce Jésus de Nazareth, mais seulement à lui pas à d’autres, pas à
nous. Etonnés, intéressés peut-être, ils restent au bord du chemin et regardent
passer le ressuscité sans entrer dans son cortège en marche vers le ciel.
Si Jésus n’était ressuscité que pour lui, il
serait un terrible égoïste. Son Dieu ne serait pas Amour. Comme le disait
l’apôtre Paul, nous serions les plus malheureux d’entre les hommes. Mais il
ajoute : « Si nous sommes passé par la mort avec le Christ, nous
croyons que nous virons aussi avec lui. » Plus encore, il ose écrire aux
Colossiens : Vous êtes ressuscités avec le Christ ». Et aux
Ephésiens : « Dieu nous fera assoir dans les cieux avec le
Christ ressuscité ».
Et Jésus lui-même l’a dit : « En
étant fils de Dieu, vous êtes fils de la résurrection. »
Qu’est-ce que ça change pour nous ? Car si
ça ne change rien, à quoi bon croire ? à quoi bon fêter Pâques ?
Contre vents et marées –qui ne manquent pas de
nos jours-, il nous faut continuer de témoigner que le destin de l’homme –de
tout homme- dépasse les frontières de sa mort et que nous sommes des promis à
la résurrection à cause de Jésus. Oui,
l’affirmer humblement mais courageusement, sans forfanterie mais sans honte non
plus. C’est peut-être notre mission en ce monde, même si nous devenons un petit
reste. Porter cette espérance pascale, c’est un beau service à rendre à toute
l’humanité.
Mais le dire ne suffit pas. Il faut le vivre
pour pouvoir le montrer et peut-être donner envie d’y croire. Dès ici-bas, dès
maintenant, il y a une manière ressuscitée d’exister en ce monde, il y a une
façon pascale d’être des humains. Tout l’évangile nous y invite, et nous
recevons les grâces pour cela, par l’Esprit Saint.
Parce que notre vie comme notre mort est
suspendue à l’évènement de Pâques, nous pouvons exister pleinement sur cette
terre en fixant notre regard sur les réalités d’en haut, celles qui donnent
sens à la vie, qui dessinent l’avenir de l’humanité, qui impactent le destin de
l’univers lui-même.
Quand quelqu’un se laisse « pâquer »
avec le Christ, il revoit son échelle des valeurs : l’être avant le
paraître, la générosité plutôt que l’accumulation des avoirs, l’attention aux
plus pauvres et aux plus souffrants plutôt que la jouissance égoïste de son
petit bonheur dans son coin.
Et puis s’engager, autant que possible, chacun
selon ses moyens et capacités, pour transformer notre société afin qu’elle
ressemble, au moins un peu, au royaume qui nous attend, à savoir celui de la
fraternité universelle dans la justice et dans la paix.
Sans oublier que l’Eglise est et doit être une
famille pascale dans laquelle nous anticipons, par nos relations et par nos
engagements, l’ambiance promise dans le royaume de Dieu. Oui, une Eglise de
l’unité retrouvée, avec des communautés un peu plus chaleureuses, dans
lesquelles hommes et femmes –comme au jour de la première Pâques – collaborent étroitement
pour annoncer joyeusement la bonne nouvelle du salut.
Fêter Pâque, c’est beau, c’est joyeux. Vivre
Pâques, c’est encore plus beau, c’est heureux, en faisant des heureux. Car
finalement, si nous basculerons un jour dans le royaume par la grande
attraction de l’amour divin, ce même amour peut déjà inspirer et dynamiser
notre vie d’aujourd’hui. Toujours miser sur l’amour : c’est ça Pâques.
Semons des graines de Pâques tous les jours, et
notre monde aura peu à peu l’allure d’un jardin du royaume.
Claude
Ducarroz